Le déploiement effectif de la profession infirmière sur tout le territoire : une solution aux déserts médicaux…

Publié le 08/11/2022

Alors que les besoins en personnels soignants restent toujours très importants dans l’hexagone et dans les DOM avec une forte tension sur les profils infirmiers et aides-soignants, une étude cartographique proposée par l’Ordre national des infirmiers (ONI) apporte une vision inédite de la densité infirmière, y compris dans les déserts médicaux.

Le déploiement effectif de la profession infirmièreCette cartographie que vient de proposer l’ONI (1) constitue un matériau inédit, au plus près de la réalité du terrain, centré sur les infirmiers en activité en 2022. En effet, leur nombre a toujours fait l’objet de réserve compte-tenu d’outils de recensement insuffisants. D’ailleurs, en juillet dernier, la direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques, communiquait sur la surévaluation, par ses services, des effectifs de la population infirmière en France. Évaluée par cette direction relevant du ministère de la Santé et de Bercy, à 765 000 infirmiers début janvier 2022, la population infirmière serait en réalité proche de 637 000. Cette étude de référence apporte donc un éclairage neuf, notamment sur la densité infirmière dans les déserts médicaux ce qui permet à l’ordre des infirmiers de souligner la montée en compétences nécessaire, voire indispensable, des infirmiers, comme solution d’accès aux soins facilitée.

La profession infirmière couvre l’ensemble du territoire national, ce qui constitue une garantie d’accès aux soins pour les Français : la cartographie, jusqu’au niveau des bassins de vie, pointe la présence d’infirmiers sur les 1663 territoires relevés. Certaines nuances territoriales apparaissent, entre des zones où la densité de la présence infirmière est particulièrement élevée - Pyrénées, est de l'Aquitaine, Limousin, Auvergne - et d'autres où elle se concentre davantage dans les villes moyennes ou les capitales régionales – Ile-de-France, Sommes, ex Haute Normandie, Pays de la Loire, est de la Bretagne. Mais toutes les zones comportent une présence infirmière significative.

« L’âge moyen des infirmiers – 39,4 ans – est nettement moins élevé que celui des autres professionnels de santé. Cependant, dans les zones où l’âge médian de la population est élevé, l’âge médian des infirmiers est également élevé. »

Densité des infirmiers 2022

Dans les déserts médicaux, les infirmiers en exercice sont fortement présents : la densité infirmière, tous modes d’exercice confondus, est particulièrement élevée dans les zones de sous-dotation médicale, en particulier de médecins généralistes. Si les infirmiers salariés sont naturellement davantage présents dans les villes d’implantation des hôpitaux, les infirmiers libéraux sont installés aussi bien dans les villes moyennes ou grande qu’en milieu rural ou périurbain.

Densité des infirmiers libéraux 2022

Les Maisons de Santé pluridisciplinaires (MSP), présentes dans près de deux tiers des bassins de vie, dessinent de nouvelles formes d’exercice coordonné entre professionnels de santé.

Les Maisons de Santé Pluriprofessionnelles

Au regard de cette cartographie très parlante, l’ONI considère que la présence des 650 000 infirmiers sur tout le territoire, à l’échelon du bassin de vie, est de nature à apporter une réponse à l’enjeu de demande de soins de proximité de premier recours. « La période de la pandémie a montré leurs capacités à bâtir des expériences innovantes, avec le développement du « aller vers » les malades ainsi que les possibilités offertes par les outils numériques qui autorisent le partage d’informations entre professionnels de santé via le Dossier médical partagé (DMP) ». En conséquence, il y a urgence à faciliter l’accès aux soins pour tous à travers des solutions concrètes (accès direct aux infirmiers en premier recours, compétences en matière de consultation et de prescription, création de « l’infirmier référent » au sein des parcours de soin, acteurs de prévention dans les territoires, établissement des certificats de décès, valorisation des compétences pour les infirmiers de pratique avancée).
De fait, afin de pouvoir honorer ces missions, l’ONI renouvelle sa demande au Gouvernement de publication du nouveau décret infirmier (2) pour juin 2023. Ainsi, dès la prochaine rentrée, les étudiants en sciences infirmières pourraient être formés aux nouvelles compétences, proposant des perspectives innovantes pour notre système de santé et l’accès aux soins facilité pour tous.

Quid de la pénurie chez les soignants

• La pénurie de soignants est généralisée, étendue au monde entier. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’il manquera 15 millions de professionnels de la santé d’ici à 2030 ».

• Confronté à une pénurie importante de personnel, le secteur des EHPAD, par la voix de ses représentants, réclame 20 000 recrutements pour l'année 2023 et la mise en place de mesures d'urgence »

• Une enquête flash menée en septembre dernier auprès de 1400 directeurs de structures pour personnes âgées adhérents de la Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (FNADEPA) a révélé que 89% des directeurs faisaient face à un manque de personnel : 80 % recherchent des aides-soignants et 48 % recherchent des infirmiers.

• La situation reste très tendue dans les hôpitaux publics d'Île-de-France à la rentrée, selon les chiffres de la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) : 1 000 postes d'infirmiers sont vacants et 18% des lits en médecine, chirurgie et obstétrique sont fermés.

  1. L’Ordre National des Infirmiers publie cette cartographie de la profession infirmière en s’appuyant sur la base des 458.000 infirmiers inscrits à l’Ordre. Cette étude a été réalisée par un expert de la géographie de la santé, Olivier Lacoste.
  2. Olivier Véran alors ministre de la solidarité et de la santé s’y était engagé. L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a donc été missionné en mars 2022, mais n’a toujours pas donné lieu aux consultations prévues, alors que la démarche devait aboutir à la remise d’un rapport en juillet dernier.

Bernadette Gonguet