Premier poste en EHPAD : une opportunité rêvée !

Exercer en EHPAD, dès l’obtention du diplôme, représente aujourd’hui une possibilité d’évolution intéressante pour les jeunes infirmiers. Alors que ces établissements offrent aux nouveaux diplômés de multiples opportunités, la profession infirmière, en résidence médicalisée, prend progressivement un nouvel essor.

Gestion d’équipe, autonomie, coordination... Fini le temps où seuls les infirmiers expérimentés accédaient aux postes à responsabilités. Aujourd’hui, il est tout à fait possible de manager une équipe de soins dès la sortie de l’Ifsi. Pour cela, un endroit clé : les EHPAD. Très souvent dédaignés, les postes, au sein de ces établissements, peinent pourtant à séduire les jeunes diplômés. "Je suis une toute nouvelle infirmière et je commence ma carrière en EHPAD. Malheureusement, trop d'infirmiers considèrent qu’il s’agit d’un poste regrettable, voir misérable. Je trouve cela outrant et dommage. La technicité ne devrait pas être le seul mot d'ordre de la profession", réagit une infirmière diplômée depuis juillet 2014. "La réanimation, les urgences, la chirurgie sont les services plébiscités par les nouveaux infirmiers, mais à quel prix ?". A quel prix en effet ? Car aujourd’hui, les EHPAD proposent des perspectives d’évolution importantes généralement négligées par ces jeunes professionnels.

"La technicité ne devrait pas être le seul mot d'ordre de la profession"

L’infirmier en EHPAD, le professionnel clinicien de demain

Parmi les nombreux défis qu’offre l’exercice du métier auprès des personnes âgées, figurent la prise en charge des comorbidités et la maîtrise des connaissances anatomo-pathologiques. "Travailler en EPHAD est très enrichissant. Nous sommes confrontés à de nombreuses maladies différentes, notamment en relation avec la cardiologie, la pneumologie, la chirurgie et la cancérologie", explique une infirmière. Une diversité qui nécessite un esprit d’analyse, de solides connaissances et une réactivité. "Nous devons connaître les pathologies de l'ensemble des résidents, ainsi que leurs traitements. Il faut savoir gérer les différentes situations et juger s’il est nécessaire de faire appel au médecin, qui n'est pas continuellement présent dans l’établissement", précise Adeline, diplômée depuis quelques mois. Mais, au-delà du développement de ces compétences, les EHPAD deviennent progressivement un lieu d’exercice prometteur pour la profession. Et pour cause. "Ces établissements représentent un avenir, car la population tend vers un vieillissement latent et une perte d’autonomie. Maintenant, il y a aussi une autre certitude à prendre en compte, c’est que dans peu de temps il va y avoir un transfert de tâches, des médecins vers les infirmiers", selon le Docteur Philippe Pinilo, cofondateur d’un foyer d’accueil médicalisé pour personnes handicapées vieillissantes. "Il est évident que de plus en plus d’actes médicaux seront délégués aux infirmiers. Certains spécialistes commencent à disparaître. Actuellement, il y a de moins en moins de cardiologues en ville. Donc demain, l’infirmier en EHPAD sera davantage un coordonnateur. Il fera peut-être les échocardiographies puis enverra le patient directement en consultation, après avoir interprété les images, ou il les transmettra au médecin pour expertise, via l’informatique. Tout va changer".Un point de vue, certes, tout à fait personnel...

A court terme, c’est donc, en tout premier lieu, dans les EHPAD que ce processus "de glissement de tâches" va s’étendre de façon officielle, notamment via les protocoles de coopération. En effet, afin de palier la pénurie de spécialistes dans certaines régions, la profession infirmière, en résidence médicalisée, est amenée à considérablement évoluer. "L’infirmier de demain gagnera en compétences. Il ne posera pas de diagnostics, mais aura une réelle valeur-ajoutée en termes de regard clinique.... Le médecin retrouvera son rôle premier de consultant et d’ingénieur en santé. Son travail se limitera à la prise de décisions ou à la réorientation du patient lorsque les protocoles ne suffiront pas", prédit ce médecin coordonnateur.

"Demain, l’infirmier en EHPAD gagnera en compétences. Il ne posera pas de diagnostics, mais aura une réelle valeur-ajoutée en termes de regard clinique..."

La profession infirmière plus que jamais valorisée

Par ailleurs, de plus en plus d’EHPAD valorisent la profession en confiant aux infirmiers, notamment aux jeunes diplômés, des tâches managériales. C’est le cas chez DomusVi. En effet, cette société, spécialisée dans l’accueil et dans la prise en charge des personnes âgées, attribue à ces derniers des missions de coordination. "Le matin, quand les infirmiers arrivent en poste, dans un premier temps ils font un point sur le programme de la journée, sur les rendez-vous et sur les hospitalisations programmées afin de confier aux aides-soignantes leurs missions. Ce sont donc des éléments hiérarchiques importants dans l’organisation du personnel soignant puisqu’ils donnent des instructions aux équipes, afin d’optimiser la prise en charge des résidents", explique Christelle Perrier-Latour, directrice de la résidence Tiers Temps à Ivry-sur-Seine. "Après avoir effectué leur premier tour, ils font un point avec les aides-soignantes dans la matinée. C’est à ce moment là que les informations importantes leur sont transmises. Et, ce sont eux qui les saisissent informatiquement, permettant ainsi le suivi du médecin coordonnateur".

A cette valorisation s’ajoutent des possibilités d’évolution et des formations accessibles dès l’obtention du diplôme d’État.  « "Le groupe DomusVi propose une formation d’IDEC. C’est une activité à part entière, totalement différente du cadre de santé en milieu hospitalier. Les IDEC vont coordonner les soins. Ce sont également des managers qui encadrent les équipes soignantes. Ils font le lien entre l’établissement et les médecins coordonnateurs ou les spécialistes. Ils gèrent également toute la partie « ressources humaines » et certains font même un peu de gestion de paie. Donc, c’est très varié". Mais, cette évolution ne s’arrête pas là. "Après avoir obtenu un master de gestion des structures médico-sociales, ou de management des organisations du secteur sanitaire et social, les IDEC peuvent évoluer vers un poste de directeur d’EHPAD". Autant d’avantages qui font de ce premier emploi un tremplin intéressant.  "Je pense que pour les jeunes diplômés, l’exercice en EHPAD est plus riche qu’en milieu hospitalier. Même sans devenir IDEC, ils restent malgré tout responsables d’une équipe, notamment en l’absence de l’infirmier coordinateur. Les week-ends, ce sont eux qui  prennent les décisions et qui organisent la charge de travail. Donc, dans nos établissements, ils possèdent une autonomie qu’ils n’ont pas à l’hôpital". Enfin, contrairement aux idées reçues, l’infirmier en EHPAD est de plus en plus amené à effectuer des soins très techniques. L’hospitalisation à domicile étant actuellement en plein développement, de plus en plus d’actes invasifs sont confiés à ces établissements d’accueil. "Il faut malgré tout une certaine technicité pour travailler dans nos résidences médicalisées. Nous avons des cas de patients, suivis en oncologie, qui nécessitent la pose de chambres implantables", précise Christelle Perrier-Latour.

 "Les infirmiers en EHPAD sont des éléments hiérarchiques importants dans l’organisation du personnel soignant puisqu’ils donnent des instructions aux équipes, afin d’optimiser la prise en charge des résidents"

Le respect des concepts et des valeurs...

Si le métier d’infirmier en EHPAD a beaucoup à offrir aux jeunes diplômés, eux aussi représentent un atout majeur pour ces établissements. En effet, leur approche ingénue de la profession tend ces professionnels à exercer le métier avec un profond respect de la personne âgée. "Tant que les jeunes diplômés restent enracinés dans des valeurs humaines, ils peuvent faire beaucoup pour ce milieu, notamment en apportant une nouvelle vision de l’organisation du système de santé, basée sur des concepts tels que la qualité des soins et la bientraitance. A défaut d’inviter des intervenants pour apporter « la bonne nouvelle » aux soignants chevronnés, je pense qu’en respectant et en mettant en avant ces valeurs, un jeune professionnel transforme toute une équipe", défend le Docteur Philippe Pinilo. Travailler en EHPAD, dès l’obtention du diplôme, peut donc représenter un moyen admirable, pour les nouveaux infirmiers, d’améliorer qualité de la prise en charge des personnes vieillissantes. Il s’agit là d’un argument substantiel, qui mérite d’être sérieusement considéré par les étudiants et les jeunes diplômés en soins infirmiers dans leur choix de carrière.

"Tant que les jeunes diplômés restent enracinés dans des valeurs humaines, ils peuvent faire beaucoup pour ce milieu, notamment en apportant une nouvelle vision de l’organisation du système de santé, basée sur des concepts tels que la qualité des soins et la bientraitance."

Les citations ont été reprises de la discussion, sur le forum d'infirmiers.com, autour d'un premier poste en Ehpad. L'ensemble des échanges est à lire ici.

Gwen HIGHT 
Journaliste Infirmiers.com
gwenaelle.hight@infirmiers.com
@gwenhight